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Après 67 ans de colonisation par la France (1891-1958) émaillés de féroces résistances contre l’oppresseur, puis 63 ans d’existence en tant qu’État souverain (2021-1958) au prix de longues luttes, tous les analystes sont aujourd’hui d’accord pour dire que la Guinée a triomphé sans gloire, qu’il n’y existe encore pas grand-chose de quoi être fier. Pourquoi ?

Parce que la liberté qu’elle réclamait n’a jamais été entièrement acquise et vécue pleinement par son peuple. La pauvreté qu’elle disait préférer au prix de sa liberté est devenue son compagnon inséparable depuis soixante ans. L’espoir qu’elle suscitait à son peuple n’a jamais connu de conditions d’espérance. La prospérité qu’elle voulait pour tous s’est limitée à sa classe dirigeante seulement, laissant le reste dans la paupérisation totale. Le développement qu’elle souhaite n’a jamais vu jour. La sécurité qu’elle voulait a été de tout temps préoccupante. De plus, tous ses proches voisins qu’elle avait précédés dans l’accession à la souveraineté nationale la dépassent aujourd’hui en mille points.

Comme si tout cela n’était pas assez, la plupart du temps, alors que déjà lourdement éprouvée par une éducation bafouillée, un chômage chronique et le manque de perspectives d’avenir, sa jeunesse est prise pour cible par ses dirigeants. Ils la maltraitent et parfois la tuent chaque fois qu’elle ose lever le petit doigt pour réclamer certains de ses droits les plus indispensables. Quant à la société civile constituée en mouvement de défense de certains droits légitimes, elle n’est que l’ombre d’elle-même aujourd’hui. Pendant plus de trente ans elle n’a jamais pu réussir à exiger une seule réforme qui soit porteuse de réel changement positif. À chaque fois, ses moindres manifestations sont réprimées si violemment qu’il y a toujours des blessés et des morts. Dans le meilleur des cas, une partie de leurs protagonistes est récupérée par le camp présidentiel, tandis que les autres sont arrêtés et condamnés sans bénéficier d’une justice équitable. Idem pour les partis politiques de l’opposition, qui n’ont eux aussi jamais bénéficié de toute la plénitude de leurs droits en matière de démocratie et de respect des lois et conventions. La situation est désormais telle qu’il n’est plus possible de s’opposer. De plus en plus régulièrement, des citoyens sont harcelés et poursuivis jusque dans la tranquillité de leurs maisons dès lors qu’ils expriment une divergence de vues avec l’exécutif. L’extrême restriction des libertés a étouffé le processus démocratique amorcé dans le pays il y a plus de trois décennies.

En ce qui concerne ses infrastructures, il n’y a rien là aussi qui puisse susciter un air de matamore. Les routes, les voiries urbaines, les ponts, les chemins de fer, les aéroports, les ports en eaux profondes, les écoles, les universités, les hôpitaux, les bibliothèques, les centres culturels manquent terriblement et une bonne partie du peu qui existe est en mauvais état. Selon l’ « Annuaire statistique 2019 » publié en 2020 par l’Institut national de la statistique, jusqu’à ce jour plus de huit Guinéens sur dix ne connaissent pas la diode d’Edison ; sept citadins sur dix ne boivent pas d’eau potable ; près de la totalité des habitants du pays n’ont pas accès à un réseau d’assainissement ni ne bénéficient d’un service de ramassage d’ordures. Six adultes sur dix dont un tiers de femmes ne savent ni lire ni écrire. En cas de maladie grave, il y a plus de neuf chances et demie sur dix de mourir dans un hôpital public faute de couverture maladie universelle et de moyens personnels. On estime que seul un Guinéen sur vingt est protégé contre les risques financiers d’une simple fièvre.

Pendant ce temps…

Le pays exporte plus de bauxite que jamais auparavant. En 2018, la quantité de bauxite exportée a atteint les 62 millions de tonnes, alors qu’elle n’était que 20 millions de tonnes deux ans plutôt. D’après un dossier de Jeune Afrique datant du 4 février 2019 intitulé « Comment le secteur minier veut doper sa production en Afrique », tous les deux jours, ce sont 185 000 tonnes de bauxite qui partent du port de Kamsar en direction de celui de Yantai, le principal réceptacle des minerais destinés à la métallurgie chinoise. De plus, le ministère des Mines et de la Géologie rapporte que l’exportation de l’or brut produit industriellement en Guinée a atteint 93 259 onces au cours du premier trimestre de 2020, alors qu’elle planchait à 108 393 onces sur la même période en 2019, contre 123 922 onces en 2018 et 138 870 onces en 2017. Le Fonds monétaire international (FMI) indiquait lui-même dans son Rapport no.20/111 d’avril 2020 que les exportations minières guinéennes devraient se renforcer en 2020, portées par le rebond de la production et la hausse des cours internationaux de l’or.

En ce qui concerne le diamant, le pays dispose à ce jour de 30 à 40 millions de carats de réserves prouvées et 500 millions de carats de réserves probables. Depuis les trente dernières années, l’industrie du diamant a prospéré dans le pays et la production ne va qu’en s’accroissant. Malgré cela, des dizaines de guinéens continuent de mourir dans les mines artisanales en raison des conditions de travail pénibles et des accidents récurrents qui surviennent quasiment tous les mois dans la région de Siguiri, en Haute Guinée. Et quant à l’industrie du fer, elle est en pleine expansion, notamment depuis l’adoption en 2019 par le gouvernement guinéen de la « convention de base » pour l’exploitation des gisements de minerai de fer des blocs 1 et 2 du Mont Simandou par le consortium SMB-Winning. Un projet qui pourrait rapporter à l’État des revenus directs de plus de 15 milliards de dollars.

Voilà donc autant de paradoxes qui font des guinéens un peuple humilié. Le dictionnaire Larousse définit la honte ainsi : « Sentiment d’abaissement, d’humiliation qui résulte d’une atteinte à l’honneur, à la dignité. Sentiment d’avoir commis une action indigne de soi, ou crainte d’avoir à subir le jugement défavorable d’autrui. Sentiment de gêne dû à la timidité, à la réserve naturelle, au manque d’assurance, à la crainte du ridicule, etc., qui empêche de manifester ouvertement ses réactions, sa manière de penser ou de sentir. » Ces trois types de sentiment ainsi que les émotions qu’ils suscitent sont bien connus des guinéens. Depuis plus de soixante ans ils subissent l’humiliation de leurs dirigeants. La misère, la violence, l’insécurité, le chômage, les difficiles conditions de vie et d’habitation, l’injustice, le déficit de libertés et de démocratie, le pillage des deniers publics, l’abus de pouvoir, le manque des soins sanitaires et des premières nécessités (eau potable, assainissement, électricité courante, etc.) les torture et font d’eux un peuple à la fois résilient mais également forcé à la résignation.

Et pourtant, la Constitution guinéenne du 14 avril 2020 stipule en son article 27: « Le peuple de Guinée détermine librement et souverainement ses institutions et l’organisation politique, économique et sociale de la Nation. Il a un droit imprescriptible sur ses richesses. Celles-ci doivent profiter de manière équitable à tous les guinéens. Les ressources naturelles constituent un bien commun. […] ». Dès lors, une réforme radicale de la philosophie de gestion de nos ressources publiques s’impose, afin que chaque guinéen et chaque guinéenne puisse en bénéficier de manière équitable. Il n’est pas admissible de continuer à violer incessamment la Constitution dont le peuple se dote ou qu’on impose à elle. L’heure est maintenant sonnée pour le grand changement, l’heure est à la libération de la Guinée du poids de ses dirigeants.

Source: guineenews

Alseny Baldé Depuis Conakry

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