Le conflit qui oppose la Russie à l’Ukraine continue de susciter des réactions dans le monde mais également sur le continent africain.
La Guinée ce jeudi décidé de sanctionner le Consul honoraire d’Ukraine en Guinée pour faute lourde au terme d’une réunion de crise.
Il est reproché à Charles Amara Sossoadouno d’avoir fait circuler sur les réseaux sociaux un supposé document officiel qui appelle la Guinée à prendre position sur le conflit.
En plus de cette sanction, le ministre des Affaires étrangères de la junte guinéenne a exigé à Sossoadouno de tenir une conférence de presse afin de démentir ce supposé document officiel qui a fait le tour des réseaux sociaux.
Même si le conflit a déjà éclaté, le président sud-africain Cyril Ramaphosa ne perd pas espoir d’une médiation. Il s’est exprimé ce vendredi en marge du Intergovernmental National litigation forum.
Il en appelle au Conseil de sécurité de l’Onu d’organiser une médiation entre les deux parties afin de mettre fin au conflit et de taire les armes.
»À l’heure actuelle, les partis doivent s’asseoir ensemble, afin de mettre immédiatement un terme à ce conflit qui tend à devenir un conflit violent. Je demande donc au Conseil de sécurité des Nations unies de faire son travail de médiation. S’il y a un moment dans le monde où le Conseil de sécurité des Nations Unies doit s’affirmer, c’est bien celui où ils se donnent la main pour résoudre ce conflit et mettre fin aux guerres »,
affirme M. Ramaphosa.
Cyril Ramaphosa a également annoncé vouloir entamer une discussion avec la Russie et les Etats Unis.
»Il est temps qu’ils se donnent la main pour résoudre ce conflit afin que les guerres cessent. Ils devraient pouvoir solliciter une réunion pour que la question soit discutée. Nous sommes sur le point d’entamer une discussion avec la Russie, pas seulement la Russie mais aussi les États-Unis. »
L’Union africaine appelle à un cessez-le-feu immédiat
Le président en exercice de l’Union Africaine et président du Sénégal, Macky Sall, et le président de la Commission de l’Union Africaine, Moussa Faki Mahamat, expriment « leur extrême préoccupation face à la très grave et dangereuse situation créée en Ukraine. »
La déclaration a été publiée jeudi sur le site web et le compte Twitter officiel de l’Union Africaine:
« Ils appellent la fédération de Russie et tout autre acteur régional ou international au respect impératif du droit international, de l’intégrité territoriale et de la souveraineté nationale de l’Ukraine.
Le président en exercice de l’Union Africaine et le président de la Commission de l’Union Africaine exhortent les deux parties à l’instauration immédiate d’un cessez le feu et à l’ouverture sans délai de négociations politiques sous l’égide des Nations Unies, afin de préserver le monde des conséquences d’un conflit planétaire, pour la paix et la stabilité dans les relations internationales au service de tous les peuples du monde », peut-on y lire.
Condamnation à l’ONU
En début de semaine, l’ambassadeur du Kenya au Conseil de sécurité de l’ONU avait déjà condamné la décision de la Russie d’envoyer des troupes dans les régions séparatistes ukrainiennes de Donetsk et de Louhansk, et de les reconnaître comme des États indépendants.
« L’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Ukraine sont violées. La charte des Nations unies continue de flétrir sous l’assaut incessant des puissants », affirme Martin Kimani dans un discours prononcé à l’ONU lundi soir.
« Nous comprenons que les personnes séparées puissent regarder avec nostalgie au-delà des frontières dans l’espoir d’une réintégration, mais le Kenya refuse qu’une telle aspiration soit poursuivie par la force », ajoute-t-il.
Sa déclaration établit des comparaisons entre l’expérience africaine du colonialisme et la crise russo-ukrainienne.
« Cette situation fait écho à notre histoire. Le Kenya et presque tous les pays africains sont nés de la fin d’un empire. Nos frontières n’ont pas été dessinées par nous-mêmes. Elles ont été tracées dans les lointaines métropoles coloniales de Londres, Paris et Lisbonne, sans aucun égard pour les anciennes nations qu’elles ont séparées », dit-il.
« Au moment de l’indépendance, si nous avions choisi de poursuivre des États sur la base de l’homogénéité ethnique, raciale ou religieuse, nous serions encore en train de mener des guerres sanglantes ces nombreuses décennies plus tard », ajoute-t-il.
« Au lieu de cela, nous avons convenu que nous nous contenterions des frontières dont nous avons hérité, mais que nous poursuivrions l’intégration politique, économique et juridique du continent », poursuit-il.
« Plutôt que de former des nations qui regardent toujours en arrière dans l’histoire avec une dangereuse nostalgie, nous avons choisi de regarder vers l’avant, vers une grandeur qu’aucune de nos nombreuses nations et aucun de nos nombreux peuples n’avait jamais connue », explique l’ambassadeur.
« Nous avons choisi de suivre les règles de l’Organisation de l’unité africaine et la charte des Nations unies, non pas parce que nos frontières nous satisfaisaient, mais parce que nous voulions quelque chose de plus grand, forgé dans la paix », précise-t-il.
Les commentaires de M. Kimani marquent un changement marqué par rapport à la position précédente du Kenya au Conseil de sécurité des Nations unies, où il s’abstenait de voter.
Le Gabon et le Ghana, qui sont également des membres non permanents de l’organe, condamnent également les actions de la Russie contre l’Ukraine.
Impact économique du conflit en Afrique
Certains craignent que le coût de la vie sur le continent n’augmente en raison de la crise.
Le journal Business Daily du Kenya a publié mardi un titre en première page « Comment le conflit Russie-Ukraine va nuire aux foyers kenyans ».
« Les perturbations résultant d’une action militaire ou de sanctions pourraient également entraîner une hausse des prix du pain et de la farine de blé au Kenya, qui dépend des importations de blé en provenance d’Ukraine et de Russie », indique le reportage.
Un article du site d’information sud-africain Daily Maverick prévient qu’une guerre en Europe de l’Est « aura bientôt des répercussions et sera ressentie dans chaque village et ville d’Afrique du Sud et du monde ».
Le Mali, dont l’alliance croissante avec la Russie a aggravé les tensions diplomatiques avec ses partenaires occidentaux, n’a pas encore commenté officiellement l’imminence du conflit.
Inquiétude pour les Africains vivant en Ukraine
Dans un tweet jeudi, le ministère ghanéen des Affaires étrangères a exprimé ses inquiétudes concernant la sécurité et la sûreté de plus de 1000 ressortissants ghanéens étudiant en Ukraine.
Le ministère exhorte les étudiants ghanéens en Ukraine à se réfugier chez eux ou dans des lieux d’hébergement désignés par le gouvernement, suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
Dans le même temps, l’Union des étudiants du Ghana a demandé au gouvernement d’évacuer temporairement les étudiants ghanéens de la zone de conflit vers la province occidentale ou hors du pays et de la Russie jusqu’à ce que le calme soit rétabli dans la région.
Il y a des milliers d’étudiants africains en Ukraine, rapporte Quartz Africa notant que le Maroc, le Nigeria et l’Égypte figurent dans la liste des dix premiers pays.
Le gouvernement du Nigeria déclare qu’il va évacuer ses citoyens qui souhaitent quitter l’Ukraine suite à son invasion par la Russie.
Dans un communiqué, le ministère des Affaires étrangères du Nigeria déclare que le pays d’Afrique de l’Ouest « a reçu avec surprise » les informations faisant état de l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
Une porte-parole du ministère des affaires étrangères, Francisca Omayuli, a déclaré que l’ambassade du Nigeria en Ukraine l’avait rassurée sur la sécurité des Nigérians dans ce pays et que des mesures étaient prises « pour assurer leur sécurité et faciliter l’évacuation de ceux qui souhaitent partir » dès la réouverture des aéroports.
Un Nigérian vivant en Ukraine, Olutobi Fatonade, a déclaré à la BBC que de nombreuses personnes de son entourage prévoient de quitter le pays en raison du conflit avec la Russie.
Il a déclaré que lui-même avait une sœur qui est citoyenne britannique et qu’il prévoyait donc de se rendre au Royaume-Uni « jusqu’à ce que tout se calme ».
M. Fatonade a obtenu son diplôme de médecin en 2017. Il est actuellement producteur de musique à Kiev, la capitale de l’Ukraine.
« La plupart des gens que je connais essaient de rentrer au Nigeria et il y en a d’autres qui n’ont nulle part où aller », a-t-il déclaré à la radio BBC Focus of Africa.
M. Fatonade a déclaré que les gens espéraient toutefois que « les choses ne s’aggravent pas » davantage.
pour le sillonpanafricain.net
la rédaction.