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Conflit entre l’Alliance des États du Sahel et l’Occident : enjeux panafricains et néocolonialisme

par joel TCHASSOM
pour le Sillon Panafricain

Introduction

L’Alliance des États du Sahel (AES) est un regroupement régional récemment constitué par plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest, dont le Mali, le Niger et le Burkina Faso. Ses objectifs affichés sont ambitieux : promouvoir le panafricanisme, c’est-à-dire l’unité et la solidarité entre les nations africaines, ainsi que la souveraineté des États membres face aux ingérences étrangères.

Cependant, depuis la création de cette nouvelle alliance, l’AES fait l’objet de multiples tentatives de déstabilisation. Des « forces tapies dans l’ombre » semblent en effet chercher à étouffer son essor naissant, sans doute par crainte de voir émerger une alternative crédible au modèle de domination néocoloniale imposé jusqu’à présent sur le continent.

Ces manœuvres sournoises visent probablement à saper la cohésion de l’AES, à affaiblir sa capacité d’action et à compromettre la réalisation de ses objectifs ambitieux. Elles traduisent une lutte d’influence acharnée, où se confrontent des visions antagonistes pour l’avenir de l’Afrique.

D’un côté, l’AES porte un projet de panafricanisme et d’émancipation, de l’autre, des puissances extérieures cherchent à préserver leur mainmise sur la région. Ce bras de fer symbolise une « guerre de civilisation » aux enjeux cruciaux pour les populations sahéliennes.

Les intérêts divergents de l’Occident et de l’AES

Depuis des siècles, l’Occident, et plus particulièrement les anciennes puissances coloniales européennes, ont entretenu une vision utilitariste et prédatrice de l’Afrique. Pour ces puissances, le continent africain a longtemps été perçu comme un simple réservoir de ressources naturelles à exploiter, ainsi qu’un terrain d’influence géopolitique permettant de préserver leurs intérêts économiques et stratégiques.

Cette logique d’extraction et de domination s’est traduite concrètement par le pillage des richesses africaines, que ce soit les matières premières, les minerais ou encore les terres agricoles. Elle s’est également accompagnée du maintien de régimes politiques favorables aux puissances occidentales, au détriment des aspirations des populations locales.

À l’opposé de cette vision prédatrice, l’AES porte une philosophie, une culture et une idéologie profondément ancrées dans les valeurs du panafricanisme. Les États membres de cette alliance régionale aspirent à une véritable souveraineté, à l’indépendance économique et à l’affirmation de leur identité face à l’héritage colonial.

Plutôt que de se concevoir comme de simples fournisseurs de matières premières ou de main-d’œuvre bon marché, ces pays entendent se réapproprier leur destin et construire un modèle de développement endogène, libéré des ingérences extérieures. Ils rêvent d’un avenir où l’Afrique ne serait plus une périphérie exploitée, mais un pôle économique et politique à part entière.

Cette vision radicalement différente entre l’Occident et l’AES entre donc en confrontation directe. D’un côté, la perpétuation d’un ordre mondial favorable aux intérêts des anciennes puissances coloniales, de l’autre, l’émancipation et l’affirmation de la souveraineté des nations africaines. Un véritable « choc des civilisations » aux enjeux cruciaux pour l’avenir du continent.

La déstabilisation de l’AES par l’Occident

Face à l’émergence de cette nouvelle alliance régionale, l’AES, les forces « tapies dans l’ombre » – probablement soutenues par l’Occident – ont engagé une véritable guerre de communication et de déstabilisation. On observe en effet de multiples tentatives visant à saper la cohésion de cette organisation panafricaine.

Une des stratégies adoptées semble consister à utiliser les présidents des États voisins, considérés par les populations locales comme des « collabos » ou des marionnettes des puissances extérieures. Ces dirigeants, acquis aux intérêts occidentaux, sont donc instrumentalisés pour créer des tensions, alimenter les rivalités et empêcher tout rapprochement durable entre les membres de l’AES.

La situation tendue entre le Niger, le Bénin et les pays de l’alliance sahélienne s’inscrit parfaitement dans cette logique de division. Bien que ces États partagent des frontières communes et devraient a priori coopérer, ils semblent au contraire davantage enclins à s’opposer les uns aux autres.

Cette absence de coordination et de solidarité régionale laisse planer le soupçon d’une manipulation extérieure, dans le but d’isoler l’AES et d’empêcher tout rapprochement susceptible de renforcer son influence et son autonomie vis-à-vis de l’Occident. Une stratégie classique de « diviser pour mieux régner », héritée de l’ère coloniale.

Par ces manœuvres de déstabilisation, les forces hostiles à l’AES – probablement soutenues par les anciennes puissances coloniales – cherchent sans doute à fragiliser l’unité de cette alliance régionale, à l’affaiblir sur le plan politique, économique et diplomatique. Un moyen de préserver leur mainmise sur le Sahel et de contrecarrer l’émancipation des nations africaines.

L’Agence de notation Moody’s contre le Mali : un nouvel outil de la « guerre de civilisation »

Plus récemment, l’agence de notation américaine Moody’s a dénigré la situation économique du Mali, l’un des pays fondateurs de l’Alliance des États du Sahel (AES). Cette décision, qui intervient alors que le Mali fait face à une grave crise sécuritaire, soulève de nombreuses interrogations quant aux réels enjeux de cette démarche.

Au-delà des considérations économiques, il est légitime de se demander si cette attaque de Moody’s ne s’inscrit pas dans une forme de « guerre de civilisation » menée par l’Occident contre l’AES et les valeurs panafricaines qu’elle défend. En s’attaquant ainsi à la situation d’un pays clé de cette alliance régionale, l’Occident chercherait-il à affaiblir l’émancipation politique, économique et identitaire prônée par l’AES ?

En effet, le Mali, de par son rôle central au sein de l’AES, représente un symbole fort de cette volonté d’autonomie et de souveraineté des nations africaines. Son évincement de la scène économique internationale par une agence de notation réputée pourrait donc s’interpréter comme une tentative de déstabilisation, visant à saper la crédibilité de l’alliance sahélienne et à compromettre sa capacité d’action.

Dans ce contexte, la décision de Moody’s, qui intervient dans un climat de forte tension géopolitique, ne peut être dissociée du bras de fer opposant l’Occident à l’AES. Il s’agit probablement d’un nouvel outil mobilisé par les forces hostiles à l’émancipation des pays africains, dans le cadre de cette « guerre de civilisation » aux enjeux cruciaux pour l’avenir du continent.

Au-delà des seuls aspects économiques, cette attaque de l’agence de notation américaine semble donc s’inscrire dans une logique de déstabilisation plus large, visant à fragiliser l’unité et la cohésion de l’AES. Un moyen pour l’Occident de préserver son influence sur la région et de contrecarrer l’essor d’une alternative panafricaine à son modèle néocolonial.

Conclusion

Face à cette offensive multiforme de l’Occident, visant à déstabiliser l’émergence de l’Alliance des États du Sahel (AES), il est plus que jamais nécessaire pour les pays africains de se rassembler autour de ce projet régional. Cette « ébauche de panafricanisme » doit être consolidée et renforcée si l’Afrique veut enfin s’affranchir du joug néocolonial et construire son propre modèle de développement.

Les dirigeants du continent doivent donc faire preuve de courage politique et de lucidité face aux manœuvres de division orchestrées par les anciennes puissances coloniales. Ils ne peuvent plus se permettre de « jouer le jeu des colons », en cédant à leurs pressions ou en se laissant instrumentaliser contre leurs propres frères africains.

C’est en s’engageant résolument sur la voie de la souveraineté, de l’indépendance économique et de l’affirmation identitaire que les États africains pourront espérer mettre fin au cycle de la domination et de l’exploitation. L’AES représente à cet égard une opportunité historique de transcender les frontières héritées de la colonisation et de construire une véritable communauté de destin.

Face à la « guerre de civilisation » que lui livre l’Occident, l’AES doit donc poursuivre son combat avec détermination. Au-delà des querelles de leadership et des rivalités de court terme, c’est l’avenir même du continent qui se joue dans cette confrontation. L’Afrique a désormais la chance de s’émanciper et de s’imposer comme un pôle géopolitique majeur du XXIe siècle. À condition d’avoir la volonté et le courage de saisir cette opportunité décisive.

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