C’est dans “Sortir de la grande nuit, essai sur l’Afrique décolonisée”, le livre d’Achille Mbembe, que nous est venue l’idée du titre de cet éditorial. Même si si nous n’abordons pas ici la même problématique que lui et que nous ne parlons que du Cameroun, nous nous posons cependant en passant, la question de savoir si la décolonisation du continent n’aura été qu’un jeu de miroirs agîté pour créer une illusion d’optique permettant à ceux qui nous tiennent captifs depuis de longs siècles déjà, de venir simplement à bout des foyers de contestation et de tension qui avaient fleuris dans les années 1960 notamment dans leurs colonies d’Afrique, dans le but de s’adapter et de continuer leur contrôle politique et leur pillage économique.
Etant donc entendu que le continent n’est pas ici l’objet de notre questionnement et de la réflexion qu’il devrait susciter, nous revenons au Cameroun au sujet duquel nous nous posons la question suivante : Est-ce bientôt la fin de la longue nuit dans laquelle ce pays est plongé en général depuis 1960 et en particulier depuis 1982 ?
Une longue nuit dont la genèse remonte bien évidemment au temps des colonies, et qui se prolonge désormais avec celui de la néo-colonie que d’aucuns dans un langage réaliste et fleuri, décrivent et dépeignent comme celui de l’indépendance dans la colonie. Une longue nuit qui sous le règne de Paul Biya a tout simplement viré au cauchemar dans un pays où les choses à présent se déroulent de manière dantesque en comparaison avec ce que les populations avaient connu pendant les vingt-deux années qu’aura duré le magistère d’Amadou Ahidjo, son prédécesseur.
En effet, le moins qu’on peut dire est que le long règne de trente-huit ans de Paul Biya à la tête de l’Etat camerounais est désormais considéré par l’immense majorité de ses compatriotes et même d’Africains qui ont connu le Cameroun d’avant, comme une interminable horrible nuit. Un règne qui n’a profité qu’à une oligarchie qui manifestement n’a même pas eu, à la différence de ce qui s’est fait sous d’autres cieux dans le continent, l’intelligence de recouvrir avec les artifices d’un semblant de réussite rendant moins visibles les effets néfastes et les amères conséquences sociales qui sont objectivement inhérentes au néocoloniasme qui se caractérise principalement par la domination politique et l’exploitation économique au profit de l’étanger.
En effet, en 1960 au moment où le Cameroun accède à l’indépendance, dans la confusion générale qui régnait dans les esprits et dans le pays plongé dans un conflit opposant les nationalistes à l’occupant colonial et à ces hommes liges locaux, certains ont fait croire que le problème qui se posait n’était plus celui du projet de société mais du pouvoir politique que les protagonistes se disputaient alors. Et cette confusion était d’autant plus facile à entretenir que même le camp de ceux qui faisaient équipe avec le colonisateur et qui lui servaient de cheval de Troie contre l’indépendance réelle, avait fini par prendre à son compte, mais bien entendu du bout des lèvres, des éléments des revendications du camp nationaliste dont l’UPC était la figure de proue. Cela a ajouté à la confusion à un point tel qu’il était difficile de faire comprendre aux masses populaires que c’était de l’enfumage et de la démagogie. Soixante ans après, il apparaît désormais clairement aux yeux de tous que non seulement les orientations politiques qui avaient été faites par le colonisateur pour ses obligés placés aux commandes, étaient mauvaises pour le pays, mais en plus, que ceux qui ont actuellement la charge de les mettre en oeuvre sont de piètres incompétents. Nous pouvons donc à présent faire nôtre la célèbre citation d’Abraham Lincoln qui dit : « On peut tromper une partie du peuple tout le temps et tout le peuple une partie du temps, mais on ne peut pas tromper tout le peuple tout le temps ».
Pendant quarante longues années en effet, une oligarchie ayant malheureusement pris par la volonté de l’étranger le contrôle du pays, s’est simplement contentée de jouir des bienfaits que lui procurait le pouvoir d’Etat sans se soucier de donner ne serait-ce que le moindre signe d’une pseudo-volonté de vouloir le développer.
Désormais, le peuple non seulement n’en peut plus, mais s’est rendu de plus compte de la superchérie. A cor et à cri, il demande résolument son départ. Est-ce la fin de la longue nuit ?
This editorial has been inspired by Achille Mbembe’s “Sortir de la grande nuit, essai sur l’Afrique décolonisée”, (Dawn of a Long Night, an essay on Decolonized Africa”). Even if we are not handling the same challenges as in the publication, given that our focus in on Cameroon, we still wonder in passing however, if the decolonization of the continent was not a smokescreen meant to create an optical illusion to serve the interest of those who held us captive for centuries suppress the hotbeds of disputes and tensions that flourished in the 1960s, especially in their African colonies, with the unscrupulous intentions perpetual political domination and economic plunder of the continent.
Now, given that continent is not our main focus, we turn to Cameroon and ask the following question for reflection: Will it soon dawn after a long night in which this country has been plunged into since 1960 and in particular since 1982 ?
A long night whose genesis obviously dates as back as colonisation through neo-colonialism, that some have described coated and flowery language as a period of the independence of the colony. A long night during which the reign of Paul Biya has simply a country into a nightmare where things are now happening in an apocalyptic way compared to what the people experienced during the twenty-two years reign of his predecessor.
Indeed, the least that can be said is that Paul Biya’s thirty-eight years reign in Cameroon is now considered by an immense majority of his compatriots and even Africans who knew this country under Amadou Ahidjo, as endless night of nightmares. A reign that has been to the benefit of an oligarchy that lacks the intelligence, unlike has been the case in other countries on the continent, to cover up the inherent bitter social consequences of neoclonialism: political domination and economic exploitation for the benefit of foreigners.
In fact, in 1960 when Cameroon gained independence, in the general confusion and conflict between the nationalists opposed to colonial occupier and those who had sympathy for them, some made believe that the problem between the protagonists was that of political power and not that of a project for the country. This confusion was sustained because even the camp of those who teamed up with the colonizer, serving as a Trojan horse against independence, ended up considering nationalist elements propagated by the UPC at the front line. Even though this turned out to be mere lip service, this rather fueled confusion to such an extent that it became difficult to make the masses understand that it was rather smokescreen and demagogy.
Sixty years after, it now appears clearly to everyone that not only the political orientations put in place by the colonizer to impose its henchmen in authority were bad for the country, those who are currently in charge are grossly incompetent. So, is it not time we be reminded of this well-known and famous quote from Abraham Lincoln, « You can fool all the people all the time, and some of the people all the time, but you cannot fool all the people all the time”
For forty long years, an oligarchy which unfortunately has allowed the fate of the country to be determined by foreigners, is simply contented with enjoying the inherent benefits of power, without any concern, albeit a pseudo-will to develop it.
Now the people not only cannot stand it any longer, but have also realized the deception. Body and soul, they want him out. Is this the Dawn of a Long Night ?
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