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Les événements de mai 1945 ont révélé le vrai visage du colonialisme français en Algérie, reniant à la majorité musulmane de la population le droit de vivre dans l’égalité en droits et en devoirs avec les autres communautés. Cela a été une constante, alors que le FLN refusait toute lutte à caractère raciste ou religieux, prônait la coexistence de communautés religieuses différentes dans une future Algérie indépendante qui accorderait les mêmes devoirs et les mêmes droits à tous ses habitants, au delà des différences ethniques ou religieuses. Ces massacres aveugles firent des dizaines de milliers de victimes. Les militants du mouvement national avancèrent le chiffre de 45 000 martyrs.

Algériens victimes de la corvée de bois, le 8 mai 1945 à Aïn Abid.

Pour beaucoup de militants du mouvement national, leur résolution à combattre le colonialisme a été renforcée à la suite des massacres de mai 1945. Cependant, le FLN qui se constitua la veille du 1er novembre 1954 et mena la guerre d’indépendance ne changea pas dans ses positions essentielles, notamment vis-à-vis de la population d’origine européenne. Il ne fut à aucun moment tenté par la haine ou l’esprit de revanche et d’exclusion. Il continua de réclamer l’égalité des droits et d’affirmer son attachement au respect de toutes les catégories de la population, au-delà des différences ethniques et religieuses.

Le journal du FLN El Moudjahid du 25 avril 1960 résumait la position de la direction du FLN qui n’avait cessé de tendre la main à la minorité française se proposant de lui accorder une place dans l’Algérie indépendante : « Nous ne disons pas au colon : « vous êtes un étranger, allez-vous en ». Nous ne lui disons pas : « nous allons prendre la direction du pays et te faire payer tes crimes et ceux de tes ancêtres ». La plateforme du congrès de la Soummam d’août 1956 considérait même les Français d’Algérie comme des Algériens d’origine européenne. Elle affirmait clairement : « la révolution algérienne n’a pas pour but de « jeter à la mer » les Algériens d’origine européenne, mais de détruire le joug colonial inhumain » et affirmait « la révolution algérienne veut conquérir l’indépendance nationale pour installer une république démocratique et sociale garantissant une véritable égalité entre tous les citoyens d’une même patrie, sans discrimination ». Par exemple, parlant des habitants de confession juive, qui dans leur très grande majorité avaient obtenu la nationalité française et bénéficiaient des mêmes droits que les Français d’Algérie, le document déclarait : « la révolution algérienne a montré par les actes, qu’elle mérite la confiance de la minorité juive pour lui garantir sa part de bonheur dans l’Algérie indépendante ». Cette ouverture vers les minorités non musulmanes a été permanente au sein du mouvement national, en opposition avec les attitudes violentes et discriminatoires des forces coloniales et des extrémistes au sein de la minorité européenne, faites de répressions et de massacres tout le long de l’occupation coloniale. Les massacres de mai 1945 ont sont une illustration et révèlent le vrai visage du colonialisme. Les militants du mouvement national avancèrent le chiffre de 45 000 martyrs tombés sous les armes des soldats français et des milices des colons.

Le 8 mai 1945, journée de la fin de la Deuxième Guerre mondiale qui s’achevait par la défaite du nazisme, des manifestations sont organisées dans plusieurs villes d’Algérie pour fêter la victoire. Les organisations patriotiques du mouvement national décident de faire de cette journée un moment de revendication autour de l’objectif essentiel, l’indépendance. À Sétif, une marche d’Algériens musulmans distincte des manifestations officielles, s’ébranle dès 8 heures. 10 000 personnes défilent chantant l’hymne « min djibalina », brandissant les drapeaux des pays alliés ainsi que des pancartes réclamant la libération de Messali Hadj alors emprisonné et déporté en dehors d’Algérie, dénonçant le système colonial et demandant l’indépendance. Au premier rang marchent les jeunes scouts, arborant l’emblème du PPA. Le jeune Bouzid Saal s’empare du drapeau et le brandit fièrement, refusant de céder aux injonctions des forces de l’ordre Il est abattu par un policier. S’ensuit un massacre des manifestants par les policiers aidés par des éléments des milices françaises. À la tête de ces derniers se distingue André Achiarry, ancien sous-préfet de Guelma qui sera plus tard accusé de tortures contre des résistants juifs français pendant la Seconde Guerre mondiale. C’est lui qui, en avril 1945 organisa la création de milices armées parmi les colons européens de Guelma, sentant la montée du sentiment de révolte au sein des Algériens. Messali Hadj avait été déporté à Brazzaville dès avril 1945.

Ces manifestations se déroulaient dans un contexte particulier. Pour la première fois, les habitants de confession musulmane étaient soumis à la conscription ce qui entraîna la mobilisation de 150 000 d’entre eux au sein des forces alliées. Ils payèrent un lourd tribut dans la guerre contre les nazis et participèrent à la libération de la France. Pour le 1er mai, le PPA avait organisé des manifestations pacifiques dans plusieurs villes d’Algérie. Des drapeaux algériens avaient été brandis pour la première fois. La police mena une répression brutale. Il y a des morts à Alger et à Oran. Le PPA est accusé d’être proche des milieux fascistes, alors que Messali Hadj avait auparavant soutenu le Front Populaire français et affirmé son opposition au nazisme. Il ya des morts à Alger et à Oran. Belhafaf Mohammed Ghazali, militant de la section des jeunes du PPA, compagnon de Mohammed Belouizdad, tombe en martyrà Alger, à la rue d’Isly (aujourd’hui rue Larbi Ben M’hidi) en brandissant le drapeau algérien qu’il avait confectionné et qu’il avait refusé de remettre à la police.

Ferhat Abbas avait auparavant adressé au gouverneur général un message dans lequel il demandait que les Algériens mobilisés ne soient pas « privés de leurs droits et des libertés essentielles dont jouissent les autres habitants de ce pays ». Le premier mai, il s’était rendu au gouvernement général pour présenter ses félicitations pour la victoire. Il a été aussitôt arrêté et emprisonné. Beaucoup de militants du mouvement national n’avaient pas oublié la déclaration du président américain Franklin Roosevelt lors de l’adoption de la charte atlantique de 1941 affirmant « le droit qu’ont tous les peuples de choisir la forme de gouvernement sous laquelle ils entendent vivre », déclaration accueillie avec beaucoup d’espoir.

Le 8 mai 1945 une manifestation se déroule à Guelma dans l’après-midi, regroupant plusieurs milliers de jeunes dont certains viennent des villages environnants pour assister au marché. Ils brandissent les drapeaux des pays alliés et l’emblème des patriotes algériens. La répression est conduite par le sous-préfet Achiary à la tête des milices constituées par les colons. Des militants du mouvement des AML sont arrêtés et torturés. Le lendemain du 8 mai 1945 Achiary organisa l’exécution sommaire des personnes arrêtées : scouts musulmans, élèves des écoles coraniques, militants AML, syndicalistes, etc. On retient le sacrifice des frères Seridi, de Mohammed Regui, des frères Ouartzi, des frères Abada, des jeunes scouts de la troupe Ennoudjoum et de bien d’autres encore. Certains lieux sont devenus tristement célèbres, comme lieux d’exécution tels que Kef el Bouma et la carrière de Aïn Defla. On rapporte que des cadavres enterrés sommairement furent déterrés pour être incinérés dans des fours à chaux de la région de Guelma. Le préfet de Constantine Lestrade Carbonnel avait ouvertement promis l’impunité aux miliciens extrémistes. Le général de Gaulle, alors chef du gouvernement provisoire de la Libération, avait ordonné officiellement à l’armée d’intervenir. On utilisa l’aviation et la marine contre les populations civiles. Les villages et les campagnes sont bombardés sans discernement. Les navires militaires Duguay-Trouin et Le Triomphant bombardent depuis la mer la région de Bejaïa. Devant les réactions de l’opinion publique, le général de Gaulle désigna une commission d’enquête dirigée par le général Tubert. Dans les faits, cette commission est bloquée à Alger et empêchée de se rendre sur le terrain. Arrivée à Sétif, elle est aussitôt rappelée par le gouverneur général qui pond le 10 mai le communiqué suivant : « Des éléments troubles, d’inspiration hitlérienne, se sont livrés à Sétif à une agression armée contre la population qui fêtait la capitulation de l’Allemagne nazie. La police, aidée de l’armée, maintient l’ordre et les autorités prennent toutes décisions utiles pour assurer la sécurité et réprimer les tentatives de désordre. » La violente répression et les massacres de populations s’étendent à toutes régions de Guelma, Kherrata, Sétif. À Kherrata, on précipita des prisonniers dans les gorges.

8 mai 1945 à Sétif.

Récemment, la France officielle réalisa des avancées dans la reconnaissance des crimes coloniaux qui restent cependant encore limitées dans la reconnaissance des crimes perpétués par ses soldats et les milices des Français d’Algérie. Le secrétaire d’État aux anciens combattants participe le 19 avril 2005 aux commémorations des massacres en présence du ministre algérien des Moudjahidine Tayeb Zitouni et dépose une gerbe devant le mausolée de Bouzid Saal, le jeune scout assassiné le 8 mai 1945 à Sétif. En décembre 2012 le président Hollande affirmait lors de sa visite à Alger : « Pendant cent trente-deux ans, l’Algérie a été soumise à un système profondément injuste et brutal. Je reconnais ici les souffrances que la colonisation a infligées au peuple algérien. Parmi ces souffrances, il y a les massacres de Sétif, Guelma et Kherrata. »

In Memoria

source : La Patrie News
via le SillonPanafricain

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