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Les actions portées par le Syndicat National des Journalistes du Cameroun (SNJC) en vue de la dépénalisation des délits de presse ne sont pas prometteuses.

L’élection en vue de la désignation du remplaçant de Dr Jonas Kouamouo, pharmacien et défunt maire de la commune de Bangangté, fait partie des sujets fortement médiatisés au Cameroun en ce début du mois de mai 2021. Convoqués en session de plein droit le lundi 03 mai dernier, jour de la célébration de la journée internationale de la liberté de la presse, 24 sur 40 conseillers ont brillé par leur absence, au motif qu’ils n’approuvent pas qu’Eric Niat, candidat au poste de maire et fils du président du Sénat camerounais soit parachuté par les instances faitières du parti au pouvoir, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais.

Brider l’effet des réseaux sociaux

Au parfum de cette vague de contestation, de nombreux journalistes et cameramen, une cinquantaine environ, ont effectué le déplacement pour Bangangté, question de vivre en direct de l’hôtel de ville de la localité, la session reprogrammée au 06 mai dernier par Ernest Ewango, préfet du département du Ndé. Seulement, ceux-ci ont été chassés de la salle où était prévue se tenir les travaux du conseil municipal de la commune de Bangangté en vue de l’élection d’un nouveau maire. Juste après l’exécution de l’hymne national, le préfet du département du Ndé, en violation de la loi portant code des collectivités territoriales décentralisées, a demandé au public de sortir. Une manière pour lui d’éviter que les positions contradictoires exprimées par les différents camps qui se battent pour le contrôle de l’exécutif communal soient mises sur la place publique via les réseaux sociaux et diffusées dans les medias. Mécontents, les journalistes se sont exécutés, et sont restés hors de l’enceinte de l’hôtel de ville de Bangangté, hautement surveillé par des gendarmes et policiers. Pourquoi ont-ils peur que les divergences des conseillers municipaux du Rdpc soient exposées au public ? Pour Théodore Ntetman, journaliste reporter d’images pour le compte de plusieurs chaines de télévision dont Ngtv à Bafoussam, «le préfet du Nde est présumé auteur d’une double violation. Il a violé l’article 9 alinéa 1 de la charte africaine des droits des droits de l’homme et des peuples qui consacre le droit non seulement pour les journalistes, mais aussi pour le public, d’avoir accès à l’information. » L’article 9 alinéa 1 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples dispose clairement : « Toute personne a droit à l’information. 2. Toute personne a le droit d’exprimer et de diffuser ses opinions dans le cadre des lois et règlements. »
Un manquement autant fort que Symaro Mebengo, directeur de publication du Menoua Actu et membre du Syndicat national des journalistes du Cameroun (Snjc) manifeste sa colère. Surtout que lui aussi est habituellement victime des agissements similaires du côté de la commune de Dschang où le maire de la localité l’a déclaré persona non grata lors des sessions du conseil municipal du fait du « ton éditorial pas favorable ». Ce journaliste fait savoir que la loi portant code des collectivités territoriales décentralisées exige la publicité des débats lors de toute session du conseil municipal. En effet, selon l’article 178 de ce texte : «les séances du Conseil Municipal sont publiques .Toutefois, à la demande du Maire ou du tiers (1/3) des membres, le Conseil Municipal peut délibérer à huis clos.(2) Le huis clos est de droit lorsque le Conseil Municipal est appelé à donner son avis sur les mesures individuelles et les matières suivantes: secours scolaire ; assistance médicale gratuite ; assistance aux vieillards, aux familles, aux indigents et aux sinistrés.» Le préfet du département du Ndé, approché par quelques hommes de medias, suite à un autre report du conseil municipal en vue de la désignation du nouveau maire de la commune de Bangangté, fait savoir que les deux candidats en compétition devraient s’entendre avec la hiérarchie de leur parti politique(le comité central du Rdpc) avant que les choses ne retournent à la normale. Et pour lui, il fallait faire sortir les journalistes et le public afin que via les réseaux sociaux les informations n’aillent pas dans tous les sens « au point de perturber l’ordre public ».

Le droit d’accès à l’information est un droit fondamental

Reste que certains journalistes à l’instar de Théodore Ntetmen de Info Tv maintiennent que la question du droit d’accès à l’information est un des enjeux majeurs du XXIème siècle, de par la transformation profonde de nos sociétés grâce à la révolution numérique. Pour lui, il y a beaucoup à faire pour renouer la confiance entre les citoyens et les institutions, la transparence de l’information semble tout à fait être un des moyens pour y arriver. Dans un contexte général de défiance vis-à-vis de nos représentants, ceux-ci doivent donc, selon plusieurs hommes de medias, dépasser les simples mots et passer aux actes. Il faut les convaincre que, les espérances s’étant largement exprimées, ils doivent se responsabiliser. La défiance dont ils sont victimes délite plus largement la confiance des citoyens envers la démocratie. Il faut convaincre les citoyens que se battre pour ce droit sera à terme bénéfique pour notre système politique. Me Julio Koagne, avocat au barreau du Cameroun, souligne que l’Etat, à travers le préfet du département du Ndé, n’a rien fait pour favoriser l’accès des journalistes aux sources d’informations. Le juriste précise qu’il est important de rappeler que la loi aujourd’hui n’est pas suffisante et ne permet pas un accès à l’information comme il le faudrait. En France par exemple, il existe la commission d’accès aux documents administratifs (Cada). Elle peine encore à faire ouvrir certain documents demandés par les citoyens, par faute de moyens humains. Et non par manque de volonté politique comme au Cameroun. « Ici, chez nous, l’Etat ou ses démembrements ne cessent de briller par le management de l’opacité. Les journalistes comme des citoyens n’ont pas facilement accès à l’information. Il faut sans cesse rappeler aux autorités étatiques que le droit d’accès à l’information est un droit fondamental non seulement pour les journalistes, mais aussi pour les citoyens. Il constitue l’un des fondements de la démocratie pluraliste », conclut Me Julio Koagne.
Des journalistes harcelés par le juge militaire
A l’époque, Félix Cyriaque Ebolé Mbola travaillant pour le Quotidien Mutations et Baba Wame, enseignant de cyberjournalisme à l’Ecole supérieure des sciences et techniques de l’information et de la communication (Esstic) à Yaoundé, étaient également poursuivis pour les mêmes faits. Inculpés le 28 octobre 2014, les trois accusés avaient été présentés le 22 janvier 2016, devant le Tribunal Militaire, à eYaoundé, et acquittés pour faits non établis. On leur reprochait « de n’avoir pas averti les autorités militaires, administratives ou judiciaires de toute activité de nature à nuire à la défense nationale ». Des faits prévus et réprimés par les articles 74 et 107 du Code pénal.
Courant le mois de novembre 2018, Mimi Mefo, journaliste et rédactrice en chef à Equinoxe Télévision, a été interpellée et incarcérée à la prison centrale de New-Bell à Douala parce qu’elle avait diffusé sur sa page Facebook des informations relatives à la crise anglophone critiquant les positions gouvernementales. Soupçonnée d’entretenir des relations étroites avec des leaders sécessionnistes armés, on lui a mené la vie dure. Parce ce qu’elle ne voulait pas livrer les secrets de ses « sources ambazoniennes » aux autorités camerounaises. Menacée, cette journaliste s’est exilée.
Vivien Tonfack, correspondant à l’Ouest du quotidien La Nouvelle Expression, se plaint d’être régulièrement harcelé par des autorités qui cherchent à démasquer ses sources lorsqu’il publie des papiers sensibles. Flore Kamga Kengne, correspondante de Bnews Tv et promotrice de www.237relais.com, fait partie des journalistes fichées dans les milieux sécuritaires à l’Ouest. Joseph Olinga, chef local du syndicat national des journalistes du Cameroun-Snjc se plaint que régulièrement des journalistes, y compris lui-même, seraient mis sur écoute téléphonique par des services sécuritaires engagés à démasquer leurs sources d’informations. Ce journaliste plaide pour la dépénalisation des délits de presse. Et souhaite, qu’en cas de dérives constatées suite à la publication ou à la diffusion d’un élément journalistique, que le Conseil National de la Communication soit saisi.

Guy Modeste DZUDIE

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